Xavier Dorison : « Goldorak, c’est de la magie »

C’est le blockbuster de cet automne. Goldorak est de retour avec un album incontournable qui ravive à la fois la fibre nostalgique tout en développant une intrigue moderne avec des thèmes actuels. Retour sur la conférence de presse des cinq auteurs avec une question supplémentaire en bonus pour évoquer les jouets du robot de l’espace.

Comment avez-vous abordé le défi d’adapter en manga en franco-belge?
Denis Bajram.
Je connais assez bien Goldorak pour savoir que je ne maitrise pas toutes les parties de l’équation. Il y a un type de vie dans les personnages de la culture manga qui n’est pas ce que je pratique dans mes albums. Je me sens capable d’en faire une imitation, mais pas de le réussir. Tout de suite, je me suis donc dit que je ne pouvais pas faire cela tout seul. J’ai pensé immédiatement à Brice (Cossu) et à Alexis (Sentenac). On travaille ensemble dans un atelier virtuel sur Discord et je sais qu’ils ont cette culture du personnage manga.

©2017 Go Nagai / Dynamic Planning

Brice Cossu. Ce qui me marque dans beaucoup de mangas, c’est une grande exactitude dans les détails. C’est pour cela que quand on fait un flashback avec des soldats, on essaie par exemple de trouver les bons costumes.

Est-ce que travailler à cinq personnes sur ce projet a un peu compliqué la tâche?
Denis Bajram.
Tant qu’il y a eu des remarques, on a continué le travail. À cinq, ce n’était vraiment pas malin (sourire). Je n’ai jamais autant refait de ma vie, car il y avait toujours des bonnes raisons.

Brice Cossu. La phase la plus importante en bande dessinée c’est le story-board. Il faut que ça marche en termes de narration et de dessin, que cela en mette plein la vue à certains moments et que cela soit plus synthétique à d’autres. C’est là où il y a eu le plus de versions. On a 130 pages de récit et en moyenne trois ou quatre versions de story-board. C’était vraiment épuisant. On n’a pu se le permettre, car on travaillait tous les cinq. Quand l’un de nous commençait à fatiguer, un autre prenait le relais.

©2017 Go Nagai / Dynamic Planning

Il existe beaucoup de jouets Goldorak. Cela vous a aidé pour dessiner le robot dans différentes positions? Il était important de le rendre vivant?
Alexis Sentenac, Yoann Guillo, Denis Bajram et Brice Cossu.
Nous avons bien sûr observé les jouets (en particulier le Bandai Soul de Chogokin GX-04S), ce qui nous permettait de tourner efficacement autour du robot à volonté ! Mais la limite de l’exercice est que nous ne devions pas dessiner un jouet, mais faire croire au lecteur qu’un robot d’au moins 35 mètres de haut pouvait exister ! C’est pourquoi nous avons vite laissé ça de côté (sourire).

« Goldorak » se déroule dix ans après la série animée…
Xavier Dorison.
À partir du moment où l’on aime Goldorak, on n’a pas envie de toucher à ce qui a été fait. Il y a une sorte de temple qu’on respecte. On s’est alors demandé comment on pouvait être pertinent. On est comme nos personnages, on a entre 40 et 50 ans et on arrive à un moment de notre vie où l’on regarde un peu dans le rétroviseur. On se souvient des moments de plaisir, des moments nostalgiques, des regrets. On s’est naturellement dit que c’est cela qu’on devait raconter : ce qui se passe quelques années plus tard. Pour des raisons évidentes au respect de la série et à nos envies, on s’est donc forcément placé dans une « sequel » qui peut aussi être un ultime épisode de Goldorak.

Denis Bajram. En plus, il y a l’absence de Goldorak puisqu’il n’y a pas eu d’épisode depuis les années 70. Cela ne pouvait être qu’un récit qui commençait par l’absence. C’est d’ailleurs le vrai sujet de la première partie du livre.

©2017 Go Nagai / Dynamic Planning

Avez-vous une idée de la raison pour laquelle Goldorak est devenu une telle icône pour toute une génération et même au-delà?
Alexis Sentenac.
Cela me parlait comme à un adulte et pas comme à un petit enfant. On n’était plus tellement chez les Barbapapa.

Yoann Guillo. C’est aussi très rythmé. Ça s’appelle Goldorak, mais les personnages sont très importants. Il se passe plein de choses avec eux. C’est ce que l’on a d’ailleurs voulu mettre dans le livre. Il y a plein de qualités dans Goldorak que l’on ne retrouve pas dans tout ce qui se fait aujourd’hui.

Xavier Dorison. Le design est super, c’est très bien monté, bien cadré et la musique est absolument extraordinaire, mais sur le papier, ça ne marche pas. Il n’y a rien qui tient dans cette histoire. Pourquoi l’armée n’intervient pas ? Pourquoi à chaque fois la même histoire avec les Golgoths ? Et surtout ils en font des caisses dès qu’il y a une scène triste en y rajoutant des violons. L’adulte que je suis dit que cela ne marche pas. Il n’empêche que si vous me montrez un épisode, je vais me mettre à pleurer, je vais y croire et ça va marcher. Il y a une alchimie unique. C’est juste de la magie.

« Goldorak » par Xavier Dorison, Denis Bajram, Brice Cossu, Alexis Sentenac et Yoann Guillo. Kana. 24,90 euros.

Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne
(sur Twitter)

©2017 Go Nagai / Dynamic Planning

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