Le Combat ordinaire – Tome 3. Ce qui est précieux

Marco nage en plein doute. Hanté par le suicide de son père, il est en même temps mis au pied du mur par Emilie qui veut un enfant. Un troisième volet émouvant et incontournable à l’image de la série.

Quand on ouvre « Ce qui est précieux », c’est comme si le petit noeud qui s’était formé dans la gorge à la lecture des deux premiers tomes du « Combat ordinaire » n’avait jamais disparu. Marco – qui est certainement un peu le double de papier de Larcenet – est encore sous le choc du suicide de son père malade. Il lui faut réinventer une autre vie sans lui mais, avant, il doit passer outre les regrets de ne pas l’avoir assez connu, de ne pas avoir été LE fils idéal. Il doit aussi comprendre pourquoi le carnet intime de son père n’est fait que de petits riens du quotidien sur des « souris qui ont fait leur nid sous le perron » ou « une fine couche de sable rouge qui recouvre les arbres » et dans lequel il n’apparaît même pas. Les questions existentielles se bousculent dans sa tête et la demande insistante de sa petite-amie Emilie d’avoir un enfant n’arrange rien.

Si cet album apparaît plus sombre que les précédents et si le trait prend aussi un tour plus réaliste, Larcenet use de son art habituel, le même qu’il utilise dans « Le retour à la terre » avec son compère Ferri. Hormis une partie un peu laborieuse sur les souvenirs d’un ancien gradé de la guerre d’Algérie et les atrocités commises, l’album alterne savamment les instants de gravité et de remises en question avec les moments de rigolade et de joie, comme lorsque Marco apprend qu’un éditeur a accepté de publier son livre de photos. Succession de cases silencieuses, gros plans sur les visages ou les objets, sont là pour suggérer tout en pudeur ce que Marco ressent. Et puis soudain, un éclat de rire, une réplique tordante: « Vous êtes libre ces vingt prochaines années? » demande ainsi le psy à Marco qui vient de lui exposer ses questionnements et ses crises d’angoisse.

« Jusqu’à la fin de l’adolescence, j’ai cru que la parole était un signe de faiblesse… » explique au détour d’une case le héros à Emilie. Il s’est bien rattrapé et dans « Le combat ordinaire », c’est globalement sur le sens de la vie que s’interroge Marco. Une vie s’en va, une autre pourrait bientôt arriver… ainsi va la vie. Et si pour s’approcher du bonheur, il suffisait d’ouvrir les yeux sur les choses simples de la nature? Si ces petits plaisirs étaient en fait « ce qui est précieux »?

Simple et complexe à la fois, « Le combat ordinaire » s’impose donc de plus en plus comme une aventure humaine incontournable. L’éditeur l’a bien compris. En attendant la conclusion prévue dans le prochain tome, ce troisième volet se voit réserver deux tirages: une édition classique et un tirage spécial augmenté de dix pages de dessins et de photos de repérages ainsi que d’un DVD de 52 minutes avec Manu Larcenet sur la création de l’album.

Dargaud

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