DES SALOPES ET DES ANGES

Trois femmes se rendent à Londres pour se faire avorter. Récit sensible et intelligent sur le combat des femmes à disposer de leurs corps.

Maïté, 22 ans, un boulot de sténo et un chéri; Anne-Sophie, bourgeoise de Neuilly, deux enfants et un amant; Odile, militante tous azimuts y compris au Mouvement pour la Liberté de l’Avortement et de la contraception (Mlac). Trois femmes qui n’ont a priori rien en commun mais qui pourtant se retrouvent comme d’autres dans un bus, direction l’Angleterre, pour se faire avorter. Parce que nous sommes en 1973 et que l’intervention est encore illégale en France.

Avec « Des salopes et des anges », Cestac et Benacquista traite d’un sujet délicat, qui reste sensible plus de trois décennies après la légalisation de l’avortement. Celui-ci ne sera autorisé qu’en 1975. Dédié à Simone Veil et aux 343 signataires du manifeste d’avril 1971 (dans « Le manifeste des 343 salopes », des femmes connues ou non déclaraient avoir avorté), l’album revient sur l’avortement dans l’Histoire et les conséquences sur les femmes, puis s’attache à restituer le contexte politique de l’époque pour remettre en perspective la décision de ces femmes. Avec sensibilité et finesse, les auteurs montrent que le choix de l’avortement n’est jamais anodin. Etait-ce vraiment un choix d’ailleurs? Outre les trois femmes sur lesquels les auteurs se sont attardés, on entrevoit une foule de femmes qui ont des raisons différentes d’opter pour l’avortement, qui doutent aussi. Pas question pour autant de dramatiser, de s’apitoyer ou de tomber dans un féminisme excessif. Le dessin façon gros nez de Cestac et les traits d’humour émaillant « Des salopes et des anges » rendent le propos moins grave et font passer la pilule plus facilement. Un album intelligent donc qui nous rappelle à quel point certains acquis reviennent de loin.

Dargaud

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