BLACKSAD – Tome 2. Arctic-Nation

Un nouvel opus à couper le souffle. « Blacksad » flirte avec le chef d’œuvre.

Epaulé par un reporter d’un magazine à scandale, le détective Blacksad enquête sur l’enlèvement d’une petite fille de couleur dans une ville placée sous le jouc d’une organisation extrémiste Arctic-Nation qui prône la supériorité de la race blanche.

« Quelque part entre les ombres », le 1er tome, nous y avait pourtant préparé mais ce nouvel opus est encore une fois à couper le souffle. Les qualificatifs élogieux ne manquent pas: les couleurs, déclinées surtout dans une gamme de gris dilués, sont superbes; la maîtrise de la lumière est étonnante; les décors sont d’une minutie et d’une richesse graphique exemplaire; les cadrages impeccables donnent une dimension cinématographique au récit.

Mais le plus marquant est sans doute l’antropomorphisme génial qui se dégage de l’album. Car tous les personnages sont des animaux évoluant dans un décor d’humains, celui d’une ville américaine des années 50. L’idée n’est pas nouvelle, les séries « De Cape et de Crocs » (Masbou et Ayroles) et « Canardo » (Sokal) pour ne citer qu’elles sont dans le même registre. Mais là où les Espagnols Juanjo Guarnido et Juan Diaz Canales prennent leur distance, c’est qu’ici les personnages sont réellement à la place des humains, ce ne sont pas des animaux qui parlent et vivent comme des humains à côté de vrais humains.

Certains personnages reprennent des associations animales habituelles (le renard sournois, la fouine curieuse et odorante, le bouledogue loubard par exemple) mais tous s’adaptent à la forme humaine: de la façon de se mouvoir aux expressions, tout évoque l’homme. Il est d’ailleurs assez impressionnant de voir l’aisance avec laquelle Guarnido parvient à faire passer dans une tête de chat ou d’ours polaire autant d’émotions.

Au niveau du scénario, ce second tome est encore mieux réussi. Certes comme dans le premier, Canales ne révolutionne pas le genre: « Blacksad » est un polar classique de bonne facture sans véritable suspense et dont le héros – un privé en imperméable, désabusé et solitaire, dans la lignée des Burma – tombe assez vite sur ce qu’il cherche. Mais dans « Arctic-Nation », l’histoire est beaucoup moins convenue et la chute nous réserve même quelques révélations fracassantes.

Un scénario qui s’enrichit, un graphisme de toute beauté, « Blacksad » flirte avec le chef d’œuvre.

Dargaud

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