RONCES – Tome 1. Racines électriques

Un géant aux allures de benêt débarque de sa campagne et commet des crimes sanguinaires dans le métro. Un premier tome alléchant grâce à son scénario intriguant et une narration très visuelle.

C’est un grand gaillard à la force colossale qui quitte sa campagne pour la grande ville. Qui est-il et que vient-il y faire? Nul ne le sait mais les gens qu’ils croisent meurent les uns après les autres dans d’horribles circonstances.
Une série « horrifico-steampunk ». C’est ainsi que l’éditeur présente le premier tome de « Ronces » pour lequel Morvan s’est associé à un tout jeune dessinateur, Alexandre Nesme, dit Nesmo. Le steampunk est un mouvement littéraire de SF né dans les années 1980 et mettant en scène toutes sortes de machines étonnantes.

Ici, il n’y a pas de de véritables inventions mais c’est bien dans un univers rétro-futuriste que débarque le héros. Il n’avait semble-t-il jamais quitté quitté son village et son premier contact avec la mégalopole est un choc: des travailleurs tristes à la marche mécanique, des cheminées crachant d’épaisses fumées noires, des gratte-ciels agressifs, d’immenses pelleteuses et tractopelles grignotant peu à peu la forêt, et surtout le métro. Ce labyrinthe souterrain, parfait reflet d’une société pressée et individualiste, dans lequel notre bonhomme va se perdre jusqu’à… en perdre la raison.

Pour son premier album, Nesmo a su rendre avec justesse l’atmosphère oppressante et glauque de la vie citadine. Hormis lorsque le géant quitte son village baigné par le soleil, jamais on ne verra la lumière du jour dans cet album. On pense à « Metropolis » ou « Blade Runner ». Le trait est précis, les tons sont bruns, orangés voire verdâtres. Mais c’est au niveau du découpage que le travail du jeune dessinateur est le plus intéressant. Plongées, contre plongées, zooms, il peut d’autant plus s’en donner à coeur joie que les dialogues sont peu nombreux. Certains cadrages sont très originaux comme cette façon de découper un décor unique en plusieurs vignettes et d’y faire évoluer plusieurs fois le personnage. Nesmo a d’ailleurs tendance à systématiser ce procédé mais l’effet recherché est bien là: le récit est fluide, la tension palpable.

Parfois aussi, les auteurs ménagent des pauses. Ces moments de réflexion nous aident à mieux cerner les deux personnages principaux: le mystérieux campagnard enfermé dans sa solitude et le commissaire Édouard Mornières, chargé d’élucider les crimes, en proie à de graves problèmes familiaux et seul lui aussi.

« Racines électriques » ne répond pas à nos interrogations sur cet étrange meurtrier mais l’univers décrit, la psychologie des personnages présentés et le retournement final mettent l’eau à la bouche. « Ronces » est parti sur de très bonnes bases.

Les Humanoïdes Associés

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