« Courrier International »: cinq dessinateurs asiatiques à la loupe

Dans son n°721, l’hebdomadaire dresse le portrait de dessinateurs très populaires qui n’hésitent pas à caricaturer les puissants et dénoncer les injustices.

Ils s’appellent Lat, Zunzi, Kim Song-hwan, Chu Teyung et Ranabi. Cinq dessinateurs de BD et/ou de presse asiatiques dont l’impertinence vis-à-vis des gouvernants leur vaut d’être à l’honneur d’un article du n°721 de Courrier International, daté du 26 août au 1er septembre 2004.

Lat est l’auteur de « Kampung Boy » (éditée en France chez Tête Rock Underground), une BD autobiographique décrivant l’enfance rurale de Lat pendant les années 50 en Malaisie. Mais il réalise aussi trois fois par semaine des dessins dans le New Straits Times dans lequel il met en scène l’hypocrisie et la corruption ou s’attaque à des sujets comme la destruction de l’environnement ou la décadence morale.

Zunzi est l’un des caricaturistes politiques les plus connus en Asie. Publiées dans la presse locale depuis vingt ans, ses caricatures, petites et très colorées (cf. notre illustration), paraissent dans les publications les plus subversives de Hong Kong, comme le journal Apple Daily ou le magazine hebdomadaire Next. Sa cible préférée est le chef de l’exécutif de Hong Kong, Tung Chee-hwa. D’ailleurs, lors de manifestations contre le pouvoir en 2002 et 2003, certaines caricatures de Tung Chee-hwa signées Zunzi étaient brandies par les contestataires.

Kim Song-hwan est célébré comme le père de la caricature sud-coréenne. Arrêté par la police, harcelé par la censure et vilipendé par les hommes politiques en butte à ses satires, Kim a publié pendant plus de 50 ans «  »Kobau » (« M. Ko le Robuste »), une BD dans laquelle son héros est un citoyen ordinaire qui se débat en permanence avec des problèmes qui le dépassent. Kim a parodié, dans plus de 13.500 planches de quatre images, l’autocratie du premier président sud-coréen, Syngman Rhee, ainsi que Park Chung-hee, parvenu au pouvoir après un coup d’Etat en mai 1961. Aujourd’hui, à 71 ans, Kim Song-hwan a décidé de poser définitivement le crayon.

Dans ses strips en noir et blanc – « Se Nülang » (Femmes difficiles), « Shuangxiang Pao » (Le double coup de canon), « Culiu zu » (La tribu Vinaigre) – Chu Teyung s’en prend aux cols blancs et montre l’absurdité du monde contemporain. Depuis 1998, ses albums se sont vendus à plus de 2 millions d’exemplaires y compris en Chine continentale. Ce qui n’empêche pas les détracteurs de Chu Teyung d’estimer que l’engouement pour ses BD en Chine populaire « reflète l’asthénie et le vide de la pensée de la classe moyenne chinoise actuelle ».

En 1977 au Bangladesh, Ranabi créait une BD dont le héros était un pauvre gamin des rues. Lors de sa première apparition on voit le jeune Tokai derrière un bureau fait de quelques briques empilées. En dessous, la légende dit: « On va jouer au secrétaire du secrétaire. » Ce jeu de mots visait l’incurie de l’administration. Ce fut le point de départ de la saga Tokai.

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