Jonathan Munoz: « C’est un peu lié à Charlie Hebdo »

Après l’attentat contre « Charlie Hebdo », Jonathan Munoz a repris l’écriture de son projet sur le fanatisme. Un sujet qu’il explore avec un humour cinglant dans l’incroyable histoire d’un Dieu adolescent impliqué malgré lui dans l’enlèvement d’une petite fille.

« Godman » est d’abord une critique du fanatisme religieux. Cela a été le point de départ de cette série ?
Jonathan Munoz.
Oui et non. Pour moi, le sujet était plus le fanatisme en général. J’avais travaillé sur ce sujet puis l’avais un peu abandonné. Je l’ai repris après l’attentat contre Charlie Hebdo. C’est un peu lié. Du coup, ça a été un peu le point de départ du livre.



Quand on parle de religion, c’est mieux d’ancrer son histoire aux États-Unis ?
J.M. En France, on n’est quand même un peu athée par rapport aux États-Unis où la religion est carrément étatique. Les présidents américains peuvent glisser « God bless America » dans un discours. C’est donc plus intéressant d’ancrer l’histoire là-bas et aussi plus spectaculaire. Dans la Creuse, ça aurait été un peu moins impressionnant (sourire).

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Pourquoi un Dieu adolescent ?
J.M. 
C’est une période de transition très intéressante où l’on se construit. C’est un adulescent. Il se pose des questions sur la vie, mais au niveau intellectuel, c’est encore carrément un enfant. On est aussi plus drôle à cette période que vieux et aigri (sourire).



Dans l’esprit, « Godman » m’a fait penser à la série télé « Lucifer »…
J.M. 
Je ne connais pas cette série. J’ai plutôt été influencé par le film « Chronicle », où des ados héritent d’un pouvoir. Je trouve génial que pour une fois, ils ne se sentent pas investis d’une grande mission, mais s’amusent avec leurs pouvoirs. Même si c’est louable, ça m’a toujours paru bizarre que quelqu’un qui en possède s’en serve pour sauver le monde ! C’est pour cela que Spiderman m’a toujours fasciné. Il pourrait être riche, mais vit dans un taudis en utilisant ses pouvoirs uniquement pour combattre les méchants.



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« Godman » parle aussi de la célébrité, de la presse people…
J.M. Ça a toujours existé, mais ça prend des proportions catastrophiques. Les propos sont parfois même déformés par les médias. Je ne veux pas défendre Dieudonné, mais il a déclaré un jour être « antisioniste » et ça a été repris par un journaliste en « antisémite ». Cela peut être assez violent. On le voit aussi en ce moment avec les manifestations où les journalistes parlent de prise d’otages pour qualifier les grèves. C’est un mot fort qui influence l’opinion publique de manière assez hallucinante.

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« Godman » est à la fois un récit de super héros, une intrigue policière et une histoire d’amitié tout en proposant des répliques très drôles…
J.M. Je n’y ai pas du tout pensé pendant l’écriture alors que beaucoup de critiques parlent justement de ce mélange des genres. C’est venu naturellement. J’ai commencé par créer mon personnage principal puis l’histoire s’est construite autour de lui. Je me suis dit qu’il pouvait bien s’entendre avec la petite fille. Puisque ce ne serait pas marrant s’il restait toujours avec elle et qu’il fallait donc la faire disparaître. L’histoire est née en construisant le personnage.

Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne

(sur Twitter)

« Godman » de Jonathan Munoz. Fluide Glacial. 14,50 euros.

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