UN TAXI NOMME NADIR

Paris by night à travers les yeux d’un vrai chauffeur de taxi. Un road-movie façon « Striptease » intéressant.

Ce n’est pas parce qu’on est assis toute la journée (ou la nuit) devant un volant qu’on a rien à raconter. Quadrillant toute la ville, embarquant des clients d’origine et de conditions différentes, les chauffeurs de taxi ont au contraire beaucoup à dire sur tout, sur rien, sur la vie quoi.

« Un taxi nommé Nadir » est né d’entretiens avec l’un d’eux, Nadir, un vrai chauffeur de taxi parisien d’origine algérienne. Ses propos ont été recueillis en 1991 dans son véhicule par deux auteurs, Tévessin et Multier, qui signent ici leur premier album.

Des bourgeois, des voyous, des astrophysiciens arrogants, des prostituées, des mamies qui avouent pour la première fois leur infidélité… La faune éclectique qui peuple Paris la nuit ne cesse d’étonner Nadir qui l’observe et en fait profiter le lecteur. Car Nadir a ce qu’on appelle du bagout. Emmanuel Guibert (« Le photographe ») qui a écrit la préface ne tarit pas d’éloges pour les personnes ainsi dotées par la nature: « En parlant, ils font une oeuvre. Le simple procès-verbal d’une conversation avec une personne à bagout enterre les deux-tiers de la littérature ». Quand Nadir parle, c’est donc le spectacle qui commence avec son lot de pittoresque, de suspense et d’inattendu, de bons mots.

Techniquement, cette « BD-reportage » se situe à mi-chemin entre une bande dessinée et un roman: ici pas de bulles mais le monologue de Nadir qui court sous des cases aux ambiances nocturnes réussies.

Le propos du chauffeur de taxi est parfois moins intéressant, parfois un peu long également, d’autant que certaines pages sont composées presque uniquement de texte et que l’album fait quand même une centaine de pages. Même avec du bagout, difficile de ne pas perdre en route quelques lecteurs.

Reste que cet album à paraître le 1er septembre est une vraie bonne idée dans la lignée de « Striptease », la série belge de documentaires télévisuels qui montrait sans fioritures des tranches de vie de gens ordinaires.

Actes Sud

Share