LES COEURS BOUDINÉS – Tome 1

Cinq chroniques autour d’un seul thème: la vengeance des grosses est arrivée. Un album divertissant à grignoter simplement.

L’apparence influe-t-elle sur les relations qu’entretiennent les gens entre eux? C’est le thème qu’a décidé d’explorer Krassinsky et il a choisi pour cela de mettre en scène cinq jeunes filles rondouillardes vivant à Paris, Reykjavik, Londres, New York et Rome. Parce que que l’on soit d’ici ou d’ailleurs, lorsque l’on est loin du 90-60-90 des couvertures de mode, l’amour est peut-être encore moins simple. La petite grosse que le dragueur aborde juste pour rire, pour passer le temps, pour « boucher un trou » en attendant mieux ou pour approcher la copine canon, a intérêt à avoir le moral bien accroché.

Mais si la muflerie masculine semble proportionnelle aux bourrelets de ces demoiselles, Gurddridur, Pome, Sylvie et les autres ne se laissent pas abattre. Pas question d’être éternellement des victimes, les héroïnes sont pleines de charme et réclament autant de respect que les minces. Loin d’être dupes, elles connaissent souvent les arrière-pensées des hommes qui les abordent avec « leurs gros sabots »… alors, en cinq petites histoires tirées du quotidien, elles nous concoctent des vengeances bien trempées.

Du coup, on éprouve tout au long de l’album des sentiments contradictoires: la petite ronde a beau avoir invariablement le dernier mot, les histoires sont assez cruelles et l’humour grinçant. Comme si l’héroïne avait gagné une bataille mais que, complètement désabusée, elle sait ne pas pouvoir gagner la guerre. « Les coeurs boudinés » n’est pas franchement drôle, pas franchement triste non plus. On reste donc avec un petit sentiment de malaise, ne sachant pas vraiment où l’auteur a voulu nous emmener mais on passe toute de même un bon moment de lecture.

Moderne, le graphisme n’est pas pour déplaire non plus. Le dessinateur de la série « Kaarib » (avec Calvo) rend ses nanas replètes très sympathiques, la gente masculine arborant au contraire un air niais des plus réussis… Petite originalité, chacune des histoires présente une tonalité différente: la couleur dominante bleu glacier pour « Viking veut, viking prend », le rose pour « Sexy Girl », le vert pour « Grosse Pomme », le jaune orangé pour « Luigi » et le orange pour « Sandy ».

Cinq couleurs pour cinq petites histoires qui racontent finalement la même chose: les lourds ne sont pas ceux que l’on croit.

Dargaud

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