LA FILLE DU PROFESSEUR

Une histoire d’amour abracadabrante dans le Londres de l’époque Victorienne. Un album guilleret qui ravira aussi les amateurs de films muets à la Buster Keaton.

Ce n’est pas parce qu’on est une momie vieille de 3.000 ans qu’on est insensible à l’amour. Propriété du British Muséum, Imhotep IV est amoureux de Miss Liliane, la fille du professeur qui l’a découvert et emmené à Londres. Tellement amoureux qu’il est prêt à fuir avec elle l’Angleterre du XIXe siècle pour rejoindre son Nil natal et enfin pouvoir épouser sa bien-aimée. Mais ni l’égyptologue, ni le père de la momie, Imhotep III ne l’entendent de cette oreille.

Dupuis réédite aujourd’hui dans sa collection Expresso cet album paru en août 1997. Depuis cette première collaboration, Joann Sfar et Emmanuel Guibert ont réalisé d’autres albums en commun, comme l’excellent « Les olives noires » ou « Sardine de l’espace ».

Dans « La fille du professeur », on retrouve déjà le découpage caractéristique du duo d’auteurs: six cases par planche toutes au même format et disposées régulièrement. Cette simplicité dans le découpage vient contrebalancer l’imagination débordante de Sfar. « La fille du professeur » est une sorte de vaudeville surréaliste, avec un point de départ complètement absurde: une histoire d’amour entre une jeune fille de bonne famille londonnienne et une momie égyptienne, momie dont d’ailleurs la « vivacité » ne semble étonner personne à Londres !

Sfar enchaîne les rebondissements rocambolesques, sans laisser aux héros le temps de souffler. Les portes claquent, les morts sont cachés derrière les fauteuils, Scotland Yard s’en mêle et la Reine Victoria elle-même finira dans la Tamise. Le tout emmené par des dialogues ciselés, à l’humour so british ! A la manière des feuilletonistes du début du siècle dernier, le scénario semble s’écrire au fur et à mesure. Ainsi les personnages s’embarquent à un moment pour l’Egypte mais sont de retour dès la page suivante. Difficile dès lors de deviner la fin de l’histoire avant son dénouement final. Bref, ca court dans tous les sens et on ne peut s’empêcher de penser aux films burlesques d’Harold Lloyd et de Buster Keaton. Quant à la jolie Eliane, elle a un petit quelque chose de Mary Poppins. Le dessin à l’aquarelle de Guibert contribue à créer cette ambiance de vieux film muet. Ses lavis de sépia, d’ocre ou de bleu profond sont somptueux.

L’album avait obtenu le prix René Goscinny du Meilleur Scénario et l’Alph-art Coup de cœur du festival d’Angoulême lors de sa sortie originale. Cette réédition est l’occasion rêvée de faire connaissance avec la fille du professeur.

Dupuis

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