KARI

Un seul être vous manque… Le quotidien de Kari, jeune citadine homosexuelle, après le départ de Ruth. Regard sans concession sur l’Inde d’aujourd’hui. Un premier roman graphique fort et prometteur.

Cela commence sur un thème largement employé en Inde: le suicide de deux amants. Et pourtant ce roman graphique signé d’une jeune Indienne passionnée d’histoire ancienne (1) n’a rien de traditionnel. Métaphore de la rupture amoureuse, le « suicide » laisse Kari, seule et perdue au milieu de la jungle urbaine oppressante de « Smog City ». Et l’on suit cette jeune femme qui en aimait une autre, engluée dans son quotidien, entre son boulot de publicitaire stagiaire et « Crystal Palace », l’appartement de quelques mètres carrés qu’elle partage avec deux autres filles et leurs copains respectifs.

Avec « Kari » – album que l’on présume au moins un peu autobiographique vu la ressemblance physique entre l’auteur et son héroïne -, la plongée dans l’Inde moderne est totale. Du rickshaw qu’on hèle dans la rue aux séries télé américaines comme « Friends » pour lesquelles on se passionne, en passant par les trombes d’eau qui s’abattent sans crier gare sur les passants, « Smog City » n’a rien d’un palais de princesses aux saris multicolores. Tentaculaire et surpeuplée, la ville est oppressante et Amruta Patil nous en fait humer toutes les odeurs, y compris les plus nauséabondes. Rien de vraiment glauque pourtant, le ton est poétique, flirtant même parfois avec le fantastique, tandis que le trait rugueux du fusain emplit des cases en noir et blanc pour la plupart.

« Kari » s’avère donc une jolie surprise qui aura une suite, l’album étant le premier tome d’une trilogie. Amruta Patil qui bénéficie d’une bourse de résidence sera en outre présente en France en 2009.

(1) Diplômée de la School of Museum of Fine Art de Boston, Amruta Patil travaille actuellement à un roman graphique mythico-historique de 1.000 pages relatant l’histoire de l’Inde sur 5.000 ans.

Au Diable Vauvert

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