GROENLAND MANHATTAN

Un petit esquimau emmené dans le New York des années 1900 par l’explorateur Peary. Une biographie émouvante dessinée avec brio.

Nous sommes en 1897 et l’explorateur américain Robert Peary revient du Groenland avec cinq esquimaux dans ses bagages, dont un petit garçon – Minik – et son père. Examinés sous toutes les coutures par les scientifiques, ils sont hébergés au muséum d’histoire naturelle de New York jusqu’à ce que quatre d’entre eux succombent, atteints de tuberculose. Désormais seul, Minik est recueilli par l’un des conservateurs du musée qui a un fils du même âge.

L’histoire de Minik est une histoire vraie que Chloé Cruchaudet a découvert en lisant le livre « Minik, l’Esquimau déraciné » de Kenn Harper. L’ouvrage étant une somme de détails techniques et scientifiques, la jeune dessinatrice a voulu « imaginer tout ce qui n’était pas dit, écrit, raconté » et a alors amassé une foule de documents avec l’aide de Delphine Deloget, réalisatrice d’un documentaire sur les inuits, « Qui se souvient de Minik? ». Le résultat est extrêmement vivant et émouvant. Parfois drôle – quand occidentaux et esquimaux découvrent leurs cultures respectives -, le récit vire au tragique lorsqu’il évoque le déracinement ou la mort. Il n’oublie pas non plus de nous faire sentir l’idéologie raciste de l’anthropologie propre à cette époque coloniale où les races autres que blanches sont considérées comme inférieures, bonnes à devenir des bêtes de foire voire même des animaux de laboratoire. Pour retranscrire cette histoire forte, Chloé Cruchaudet use d’un graphisme aussi intéressant que son récit: tantôt réalistes, tantôt plus naïfs, ce sont des dessins proches du crayonné, rehaussés d’une mise en couleur originale donnant beaucoup de relief aux cases. Bref, un régal sur toute la ligne.

A noter que l’album comprend quatre pages de photos d’archives nous montrant notamment le vrai Minik et son père.

Delcourt

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